La vie est trop courte pour un seul projet.
Bâtisseur de pyramide, réparateur de motos, sauveur de parquet, dentiste... Harald a plein de projets.
Harald Geiling se tient entre jantes, établis et comparateurs dans son atelier de réparation de motos. Vêtu de jeans et d'une veste bleue tachée d'huile et de saletés, il bricole au banc de redressage, sur lequel est fixé un cadre de moto. Une collision l'a fortement comprimé de 22 mm, ce qui a modifié son angle de chasse. La roue avant frotte le refroidisseur. La moto ne peut pas rester comme ça, il faut lui redonner sa forme originale. Harald élève le banc de redressage: «J'adore les réparations, surtout si d'autres me disent qu'elles sont impossibles. C'est ce qu'il y a de plus beau.»
Harald Geiling
Pourquoi l'a-t-il construite lui-même? Il ne peut pas s'en empêcher: «Le dimanche, une fois que j'ai lu le journal, je commence vite à m'ennuyer. Je dois aller faire du vélo, ou bâtir quelque chose.» Il me montre un plan sur lequel il a dessiné des cercles au compas pour former un rectangle. Le rectangle représente son nouveau centre de la moto. L'idée est de l'ériger en face de l'atelier actuel. Les cercles indiquent la distance que pourrait parcourir une grue, et où elle devrait être positionnée. Il n'a pas encore obtenu de permis de construction.
Harald Geiling
Harald n'a encore jamais connu d'échec cuisant. Il a toujours suivi son instinct, notamment lorsqu'il a construit la pyramide. Un bureau de géomètres avait défini les fondations par points sur lesquelles les appuis de la pyramide devaient être posés. Une fois que Harald et Wiktor ont creusé la moitié des fondations, Harald a eu l'idée de mesurer à nouveau le tout pour vérifier que les emplacements étaient corrects. Et ils ne l'étaient pas! La base de la pyramide n'était pas carrée, mais plutôt semblable à un parallélogramme. «Heureusement, nous n'avons eu aucun dégât, parce que nous l'avons remarqué à temps», me raconte Harald.
Enfant, il fabriquait déjà des objets. A six ans, il a construit un jeu de croquet, avec maillet, boules et arceaux en fils métalliques. A huit ans, il s'est aménagé un atelier et a monté lui-même des étagères avec du bois de recyclage. A 15 ans, il s'est acheté un appareil de soudage avec son argent de poche et s'est fabriqué un vélomoteur. «J'ai toujours investi beaucoup d'argent dans des outils, et je les ai améliorés lorsque c'était nécessaire.» Il procède toujours de même aujourd'hui. S'il reçoit une moto qui présente un défaut qu'il n'a encore jamais vu, il fabrique un outil spécial pour la réparer.
Harald Geiling
Son téléphone sonne. Un ingénieur en protection incendie l'appelle au sujet de travaux dans la pyramide. Harald discute une demi-heure et s'énerve: «Construire est très facile. Parfois, cela dure plus longtemps pour s'accorder avec les services d'urbanisme. Mais tout ira bien, mon nouveau centre de la moto verra le jour.» D'ici là, il consacre quelques heures à la rénovation d'un appartement au centre de Mayence pour son fils et ses colocataires. «Il vaut mieux avoir deux ou trois projets en parallèle.» «La vie est trop courte pour un seul projet.»
Texte: Katrin Hummel | Photos: Thomas Pirot