Samedi, 8h du matin, dans le petit village encore endormi de Farchant, situé au pied de la Zugspitze. J’entre dans une vieille menuiserie transformée en atelier. Une odeur de sciure m’enveloppe. L’endroit est rempli de skis, du sol jusqu’au plafond.

Fabriquer des skis soi-même? Les travaux manuels ne me font pas peur, mais je ne suis pas menuisier. Et certainement pas fabricant de ski. Mais mes vieux skis, fidèles compagnons sur les pistes, ont rendu l’âme, et je ne veux aucun modèle en plastique. Après quelques cogitations, je trouve une solution tout à fait logique à mon problème. Il ne me reste plus qu’à me mettre au travail.

Je m’inscris donc au cours d’Axel Forelle, qui a appris la fabrication de ski en autodidacte. Il est à présent très expérimenté. «Qu’y a-t-il de plus beau que de fabriquer ses skis soi-même? «Chacun veut une paire de skis qui répond à ses besoins individuels.» Je suis définitivement au bon endroit. Alors que je songe déjà à mes nouveaux skis, Axel me ramène sur Terre. Il me met un coffre à outils entre les mains. Ne perdons pas de temps, nous avons beaucoup à faire.

Axel Forelle

Les premières étapes sont difficiles. Afin que mes skis glissent parfaitement, ils sont enduits d’une couche de graphite, comme les skis de compétition des pros. Ils sont aussi très solides. Un patron de revêtement prédécoupé doit être taillé à la bonne forme et poncé afin qu’il ne reste ni fragment ni fibre. Les carres en métal sont ensuite posées et mises en forme. Une fois qu’elles sont parfaitement adaptées au patron, je peux les coller. La colle sèche vite, je dois faire preuve de rapidité. Et de précision. Avec un peu d’aide, je parviens à obtenir des carres exactes, au millimètre près. Première étape franchie.

Les premières étapes sont difficiles. Afin que mes skis glissent parfaitement, ils sont enduits d’une couche de graphite, comme les skis de compétition des pros.

Je n’aime pas les fioritures, je veux que mes skis soient aussi sobres que possible. Du bois, tout simplement. Pour la surface de recouvrement, je découpe donc un beau placage de noyer veiné de la longueur des skis à l’aide d’une équerre et d’un cutter pour tapis. Axel a déjà découpé le patron en bois destiné au cœur à l’aide d’une raboteuse qu’il a conçue lui-même. Il a opté pour du bois de frêne, stable grâce à ses longues fibres. Mais mes skis doivent encore gagner en stabilité si je veux pouvoir dévaler toutes sortes de pistes. Je découpe donc deux couches de fibres de verre de la même longueur que le cœur pour le renforcer par la suite.

Je n’aime pas les fioritures, je veux que mes skis soient aussi sobres que possible. Du bois, tout simplement.

Allons droit au but: quelle vitesse veux-je atteindre, et quelles caractéristiques veux-je donner à mes skis? Ces éléments déterminent la forme et la courbure des skis. La répartition de la pression et la vitesse des skis dépendent de leur courbure. Je veux être très rapide. Je place donc des lames de bois sous le renfort, jusqu’à ce que j’obtienne la bonne forme et la bonne courbure. Je dois faire preuve de précision: si je me trompe, j’aurai du mal à glisser droit. Je termine en pressant le renfort avec le billot.

La répartition de la pression et la vitesse des skis dépendent de leur courbure. Je veux être très rapide.

Cette étape consiste à assembler toutes les parties, dont les fibres de verre et le cœur en bois. Et à les laminer avec de la résine époxy. Nous procédons couche après couche. La résine durcit rapidement, Il faut faire vite, Je l’applique sur les semelles à l’aide d’un petit rouleau. Puis vient la première couche de fibres de verre, le cœur en bois, encore une couche de fibres de verre, et le placage de noyer.

Afin de presser les skis de manière optimale, ils sont placés dans un sac sous vide. L’air et la résine sont aspirés vers l’extérieur. Le vide exerce une pression de plusieurs tonnes sur l’assemblage de bois et de résine et comprime le tout à la forme désirée. Afin que les skis durcissent, ils passent la nuit dans un four à 60° C.

Cette étape consiste à assembler toutes les parties, dont les fibres de verre et le cœur en bois.

Il fait un froid glacial le lendemain matin. La Zugspitze est encore enveloppée de brouillard. Nous ouvrons le four. Quel beau moment! J’ouvre le sac sous vide et vois mon travail pour la première fois. Mes skis ont encore l’air d’un snowboard. Toutes les pièces forment un bloc afin d’être collées uniformément. Je peux à présent scier les semelles grâce aux arêtes de sciage. Je retire les excédents de résine époxy à l’aide d’une scie sauteuse. Une fois les finitions terminées, les skis ont leur forme finale: longueur, largeur et carres en métal, tout est comme je le voulais.

La couche finale J’ouvre le sac sous vide et vois mon travail pour la première fois.

Les carres sont affûtées à l’aide d’une ponceuse à bande, les surfaces poncées à la main. Pour terminer, j’applique une couche de vernis transparent pour protéger mes skis. Ils brillent. Je suis fier comme un pape et me réjouis de dévaler ma première piste.

Les carres sont affûtées à l’aide d’une ponceuse à bande, les surfaces poncées à la main. Pour terminer, j’applique une couche de vernis transparent pour protéger mes skis. Ils brillent.

Texte: Benedikt Auer | Photos: Enno Kapitza